Personne n'ignore que Montluçon fait partie des ville moyennes durement impactées par les effets de la mondialisation et de la concentration des richesses sur les grandes métropoles. Ce phénomène a été largement documenté par certains journalistes d'investigation, à tel point que parfois notre ville est choisie en exemple, notamment en raison du cumul des handicaps.
Le dire est une chose, le constater de visu en est une autre. Depuis longtemps nous envisagions de réaliser un reportage pour rendre compte de ce phénomène, mais comme nous manquons de moyens humains et matériel, nous avions rangé ce projet dans le tiroir en espérant pouvoir le ressortir dès que possible.
Grâce à Claude Lemoine, nous sommes en capacité aujourd'hui de sortir un premier volet de cette modeste enquête. Claude s'est muni de son appareil photo et a arpenté les rues du centre-ville et du Diénat. Voici donc le résultat de son travail. Au total, 31 photos pour témoigner de l'état d'abandon de notre ville, et de la paupérisation qui inexorablement gagne du terrain.
Il ne suffit pas de bâtir un questionnaire et le faire connaître à grand renfort de communication. Encore faut-il avoir le courage de dresser le bilan d'une situation catastrophique pour notre ville et pointer les responsabilités. Mais c'est un autre débat et cela suppose d'avoir le courage de le faire.
Nous encourageons les lecteurs de regardactu de faire la même chose dans leurs quartiers respectifs. Pour cela, n'hésitez pas à prendre contact avec nous en nous écrivant sur la boite mail du journal : contact@regardactu.com

Que deviennent les boulangeries et les petits commerces de proximité ?

Selon les chiffres publiés par la presse écrite, le français a consommé 44 kg de pain dans l’année 2015, soit trois fois moins qu’en 1950.
Peut-on trouver une boulangerie dans l’est montluçonnais, dans le quartier Forges/LEM/Barathon, oui en cherchant bien.
Au carrefour Forges/Mme de Staël/Rimard existaient 2 boulangeries voisines l’une de l’autre il y a un quart de siècle, ce n’est pas si loin ; leurs locaux abritent aujourd’hui un prothésiste dentaire et un établissement de cours de maths. Plus rien rue de la Presle ni avenue Mme de Staël ni rue Barathon. Faut-il donc aller en grande surface pour acheter son pain ?
Pourquoi les boulangeries disparaissent-t-elles, ne sont-elles pas reprises par de jeunes boulangers ?
Le travail de boulanger est prenant, avec des horaires décalés ; il faut se lever tôt pour préparer la pâte. Mais il existe des astuces.
Quand dans les années 80, des commerciaux d’EDF allaient proposer des fours électriques et des frigos pour conserver la pâte, on leur disait : « Vous ne vendez pas un matériel moderne, mais 2 heures de sommeil ».
En effet, on peut préparer la pâte la veille dans l’après midi, la mettre au frigo qui, à une heure donnée se réchauffera pour la faire lever, faisant gagner du temps de sommeil au boulanger qui trouve à son réveil la pâte prête à cuire.
Mais il y a aussi la concurrence des terminaux de cuisson et les super/hyper marchés qui vendent la baguette à prix cassé. Le pain y est-il aussi bon qu’en boulangerie ?
Voyage dans ce quartier et dans la vieille ville au devant des boutiques fermées dont on retrouve les numéros de photos dans le texte.
Les boulangeries disparaissent à l’Est montluçonnais.
Avenue Madame de Staël, une jeune boulangerie n’a pas tenu le coup. Celle de la rue de la Presle (1) a fermé du jour au lendemain sans explication, rue de la Comédie dans la vieille ville, cette boulangerie (2) alimentait aussi les usagers du marché ; deux établissements de la rue Barathon n’ont pas eu de repreneur (3 et 4). Heureusement qu’il reste la boulangerie de la rue des Forges, mais lorsque qu’elle est en vacances ou que c’est son jour de fermeture, il faut aller beaucoup plus loin.




Autres boutiques fermées, entre le LEM et les Forges
Il y a 30 ans ; les habitants du quartier du Diénat avaient tout sous la main : un boucher rue de la Gironde (5), un charcutier face au LEM devenu une permanence politique (6) et dans le même pâté de maisons, l’Auto-École était une épicerie.


Rue des Forges côté pair (7) et impair (8), rue Porte des Forges, l’ancienne crêperie (9) du même nom (avec l’image d’Ordralphabétix) est fermée sans successeur, en face s’est récemment fermée cette boutique pour animaux de compagnie (10) après s’être appelée « Bretzel doré » (à l’époque où Georges W. Bush en avait mal ingurgité un), boulevard de Courtais, ce local d’un ancien marchand de meubles (11) est inoccupé depuis plus de 25 ans et une ancienne agence immobilière (12) attend son repreneur.






Et aussi rue Barathon
En plus des deux boulangeries, la boutique fermée à l’angle de la rue André Messager (13) a successivement connu fleuriste et chocolatier, le « fitness » du n°19 (14) a déménagé et la boutique du n°23 (15) a fermé il y a moins d’un an.



De même que dans la Vieille Ville
Zappons la bonne dizaine de locaux fermés sur le boulevard, dont beaucoup d’enseignes nationales (qui n’ont pas dû atteindre les objectifs fixés pour gaver les actionnaires).
En remontant la rue Porte St Pierre, puis des Serruriers et rue Grande vers le Mupop, on voit que le traiteur (16) a déposé son bilan, que le restaurant « L’agape » (17) ne permet plus de manger à l’ombre du château, que le n°33 (18) a abrité en dernier un marchand de miniatures, que le n°38 logeait un institut de beauté (19) et sert maintenant de panneau d’affichage, tout comme plus haut le n°1 (20), lui même voisin de l’ancien restaurant « L’Escale » (21) dont l’immeuble (à réparer) est vendu plus de 200k€ par un établissement luxembourgeois (selon la banderole en façade).






En face, une ancienne pizzeria et un ancien café (22), et vis à vis du Mupop, les façades du n°4 (23) et du n°8 (24) de la rue Notre Dame n’agrémentent pas les abords de ce musée.



En revenant vers le boulevard en passant par la mairie, après être passé devant la boutique « Salon Fée Main » (25) et l’ancien restaurant « Côte d’Asie » (26), on pourra remarquer le désert commercial de la Place de la Comédie complétant celui de la Sous-Préfecture dont la plupart des services ont disparu, avec cet ex-café (27), ces boutiques (28 et 29), avant d’être complétées par celle donnant sur la Place Jean Jaurès (30) à côté du cabinet vétérinaire ayant déménagé (31).







Conclusion
Cette désertification d’un quartier de la ville n’est pas isolée, c’est le cas partout, et dans toutes les villes petites et moyennes au profit des métropoles.
D’autre internautes montluçonnais peuvent immortaliser ce triste bilan en l’enrichissant de leurs propres observations et photos dans leur quartier, ça ne manquera pas de sujets.
Seule une volonté manifeste d’aménagement du territoire pourrait inverser la tendance et réduire davantage la discordance déserts-ruraux/métropoles surpeuplées, mais ce n’est pas le souci de nos gouvernants depuis des décennies.
Claude Lemoine